Chronique Le Jeudi: Un «huis clos des nantis» pour sauver la planète?

December 10, 2009 by Charles Goerens

Un «huis clos des nantis» pour sauver la planète?
Vous ne connaissez pas le G180? Pas besoin d’en avoir honte puisque la plupart de ses Etats membres ne sont eux-mêmes pas au courant de son existence. Le G180 est une organisation sans statut ni règlement. Aussi chercherait-on en vain son acte fondateur. Tous les Etats-membres du groupe «Afrique-Caraïbes-Pacifique» en font partie. Un ensemble de pays en développement donc? Non, parce que 23 Etats-membres de l’Union européenne, qui, de toute évidence ne sont pas à ranger dans cette catégorie, adhèrent également au G180. De plus, la participation d’Etats tels le Singapore, le Chili, le Vietnam, le Laos, l’Ukraine, la Géorgie, l’Islande, la Norvège, la Nouvelle-Zélande en fait un bel ensemble hétéroclite. Ni la pauvreté ni la richesse et encore moins une appartenance à un groupe linguistique ne vous prédestinent en tant que pays à y adhérer. Cela ne vous fait guère avancer mais une autre méthode nous permettra peut-être d’avancer dans la phase exploratoire. L’élimination ou l’exclusion vont sans doute nous aider à emprunter une piste plus prometteuse dans notre petite enquête, car l’adhésion à cet ensemble mystérieux n’étant pas le fruit d’un choix délibéré de ses membres, ceux-ci doivent logiquement l’existence du G180 à un phénomène indépendant de leur volonté. D’autres acteurs, par leur souci de se démarquer signent en fait responsables pour cette création hybride. Ce qui nous renvoie à la question du ou des critères retenus pour créer un ensemble distinct et exclusif. Mais qui sont-ils donc à vouloir créer une structure fermée aux autres et selon quel(s) critère(s)?
Vous l’avez deviné: Il s’agit bel et bien du G20. Le critère peut surprendre mais connaissant la psychologie de la plupart des membres du club, il n’est pas étonnant de constater que c’est finalement le PIB qui l’a emporté sur toute autre considération. Le Produit Intérieur Brut d’un pays qui confère prestige, pouvoir et considération à ses dirigeants – ceci explique cela – rend plus plausible encore la déconsidération dont souffrent ceux qui ne rentrent pas dans cette norme.
Le PIB est donc la clef qui vous donne accès à la Cour des Grands. Si, par malheur, en tant qu’Etat vous n’êtes pas suffisamment «PIBERTAIRE», vous restez dehors. Laissant cependant à Ségolène Royal le privilège d’inventer de nouveaux mots en rappelant que si le terme «pibertaire» existait en français, il ferait penser, bien entendu au mot «pubertaire». Cette connotation, à première vue, ne me paraît pas du tout déplacée dans le contexte du G20, étant donné que le terme «puberté» suggère l’idée de passage de l’enfance à l’adolescence. PIBERTAIRES, les dirigeants du G20, seraient-ils en retard d’une évolution? En effet, bien plus qu’une crise d’adolescence, il s’agit d’une véritable régression.
C’est bel et bien un remake du Directoire des Grands qui est bien antérieur à la naissance d’une «Union européenne sans cesse plus étroite» selon le Traité. Les deux premiers à s’en rendre compte à leurs dépens sont l’Autriche et le Luxembourg, tous les deux membres du G180. Les autres seraient bien avisés de se familiariser avec l’idée que les malheurs n’arrivent pas seulement aux autres.
Remake aussi d’une certaine approche de la démocratie tributaire du XIX siècle, où le droit de vote était basé sur un système censitaire: Le paiement du cens était indispensable à l’obtention du droit de vote. Cens au XIXème et PIB au XXIème siècle, les pratiques d’exclusion relèvent de la même pensée.

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Member of the European Parliament (Renew Europe)

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