Chronique Le Jeudi: Le beurre et l’argent du beurre

May 13, 2010 by Charles Goerens

Le beurre et l’argent du beurre
Au lendemain d’une défaite électorale, les perdants du scrutin s’interrogent sur les causes de la déroute. Dans un premier temps, la réaction se réduit à l’énoncé de quelques banalités: on n’a pas été en phase avec l’électeur, la crise n’a rien arrangé, on n’a pas pu imposer le thème de la campagne, bref, on attribue l’échec soit à une mauvaise stratégie de communication soit à des phénomènes externes soit à ces deux facteurs à la fois.
Au lendemain d’une crise, c’est pareil. Et souvent, l’échec électoral s’explique par l’incapacité d’en venir à bout de la crise. S’il y avait encore un doute à ce propos, il suffirait de rappeler l’impact de la communication du gouvernement fédéral allemand dans le cadre de la crise budgétaire grecque sur le résultat des élections du Nord-Rhénanie-Westphalie réalisé par les deux partis de la coalition sortante qui sont d’ailleurs les mêmes que ceux qui gouvernent à Berlin.
Lorsque la crise économique sera derrière nous, nous nous souviendrons de la corrélation entre la faillite de Lehman Brothers et son effet d’emballement sur le secteur bancaire tout entier qui, à son tour, a fini par déboucher sur l’actuelle crise de l’économie réelle.
Sans attendre l’après-crise, on peut d’ores et déjà retenir que c’est grâce à un haut degré de réactivité doublé d’une action extrêmement pertinente qu’il aura été possible d’empêcher l’économie mondiale qui, le 15 septembre 2008, était au bord du gouffre de faire le lendemain le fameux pas en avant.
Tous les observateurs sont unanimes à reconnaître à l’ensemble des responsables de la politique monétaire et budgétaire d’avoir fait preuve de sang-froid et de clairvoyance et d’avoir par là-même réussi à redonner confiance à tous les acteurs impliqués, et notamment à l’opinion publique.
Au lendemain de la crise de l’euro, il n’est pas sûr de voir les commentateurs exprimer le même satisfecit sur la façon dont l’Europe et plus particulièrement le gouvernement allemand a agi au cours des mois de mars et avril 2010.
Rien de rassurant, trop de tergiversations, un peu d’arrogance, voire de populisme vis-à-vis de la Grèce, une perte de crédit auprès des marchés et avant tout de l’opinion publique, ainsi pourrait se résumer la perception des déclarations du gouvernement fédéral dans le cadre de la gestion de la crise grecque.
Avec le recul, on pourra mesurer les dégâts causés par les responsables de Berlin qui voulaient ménager la chèvre et le chou.
La coïncidence de la publication des résultats électoraux du Nord-Rhénanie-Westphalie et de la tenue de la réunion des ministres des finances de l’Union européenne dans la nuit de dimanche à lundi nous rappelle la pertinence de cet adage. Les partis au pouvoir à Berlin doivent le constater à leurs frais. Ainsi se confirme une vérité vieille comme le monde mais applicable à la situation actuelle qui consiste à reconnaître que l’on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Depuis le petit matin de lundi dernier, c’est officiel: le beurre, c’est pour les socialistes, les verts et la gauche (Die Linke) et l’argent du beurre, il va encore falloir le trouver ou plutôt l’emprunter. Espérons que les taux d’intérêt que nous allons devoir payer dans ce cas de figure seront nettement inférieurs à ceux facturés à la Grèce.

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Member of the European Parliament (Renew Europe)

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