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Nexit?

April 14, 2016 by Charles Goerens

Le Jeudi, 14/04/2016

L’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne vise à faire converger les deux parties aux plans économique et politique. Quoi de plus normal sur un continent où 28 Etats sont prêts à coopérer davantage avec un partenaire qui aspire aux valeurs de l’Union. Il est de l’intérêt des uns et des autres de préciser les objectifs d’une telle coopération et d’en fixer les règles. Des arrangements de toute nature ont ainsi  pu être mis en place entre l’UE d’une part et des partenaires aussi différents que la Suisse, la Norvège, la Moldavie notamment d’autre part. S’agissant de nos relations avec l’Ukraine, celles-ci ont été précisées dans l’accord d’association entre l’Ukraine et l’UE. Une fois négocié, ce genre d’accord entrera formellement en vigueur dès que tous les Etats membres de l’UE, tout comme l’Ukraine, auront ratifié le texte déjà voté par le Parlement européen.

 

En pratique, cependant, le rapprochement entre l’Ukraine et l’UE n’a jamais été un fleuve tranquille. Depuis le début, Moscou a tout fait pour dissuader l’Ukraine d’emprunter la voie vers l’Occident, ce qui lui est facilité par l’hostilité manifestée à un tel accord par la partie orientale de cette ancienne République Socialiste Soviétique. L’annexion de la Crimée par la Russie ainsi que son appui ouvert aux séparatistes ont eu pour effet de plonger l’Ukraine dans des difficultés qui ne s’arrêteront pas de sitôt.

 

Et comme si cette crise ne suffisait pas, le référendum néerlandais sur l’accord entre l’Ukraine et l’UE vient encore ajouter son lot de difficultés à celles déjà existantes. Cette consultation populaire, consultative et,  pour le reste, boudée par 68 % des électeurs  néerlandais s’est soldée par un rejet par les deux tiers des votants.

 

Comment sortir de cette impasse? L’on pourrait arguer que le problème est d’abord néerlandais, que la décision d’ignorer ou non un référendum purement consultatif incombe en premier lieu au Gouvernement de La Haye et que, de toute façon, l’accord avec l’Ukraine produit déjà ses effets depuis qu’il a été signé. Ce serait ignorer que les populistes de tout poil s’acharnent à dénoncer ce qu’ils considèrent être une manipulation d’un processus démocratique.

 

L’on pourrait faire valoir que le nombre d’électeurs néerlandais ayant rejeté l’accord  avec l’Ukraine représente à peine 20% de l’électorat de ce pays et qu’il faudrait plus du double de voix pour ajouter la légitimité du scrutin à sa légalité. Cela ne serait pas de nature à convaincre les “nonistes”, avec Geert Wilders en tête, qui, de toute façon, n’ont pas tardé à dénoncer ce qu’ils qualifient de confiscation de la démocratie tant par leur gouvernement que par le “monstre de Bruxelles”.

 

Cela étant, il ne faut pas sous-estimer la légendaire ingénierie institutionnelle propre à l’UE à laquelle d’aucuns attribuent la capacité et la finesse juridique de résoudre ce problème. Il faut vraiment être naïf pour admettre qu’un compris truffé de phrases sibyllines soit de nature à réconcilier populistes et européistes, extrême droite et partis traditionnels, esprit du dix-neuvième et impératifs du vingtième siècle.

 

Comment sortir de la difficulté dès lors que toutes les solutions jusque-là envisagées ne peuvent que ternir davantage encore l’image d’une Union déjà passablement endommagée? Faut-il prendre au mot les supporters du non, même s’ils reconnaissent ouvertement que ce n’est pas l’accord avec l’Ukraine qu’ils ont voulu rejeter, mais leur but ayant été de mettre à mal la construction européenne dans son ensemble?

 

Pour le gouvernement néerlandais, la seule alternative au bricolage institutionnel qui ne pourrait déboucher d’ailleurs que sur un compromis peu convaincant consisterait à accepter à la lettre le verdict des urnes, à constater l’incapacité d’un pays à mener à bien la ratification de l’accord et d’assister par là même à la mort de celui-ci. Plus concrètement, l’incapacité de ratifier le document en question signifierait la fin de l’accord et le début d’une crise.

Cette crise pourrait être salutaire à condition de remettre à plat le fonctionnement de l’UE, notamment dans le cadre de l’adoption d’accords ou de traités. Pour ce qui est de l’entrée en vigueur d’un accord ou Traité international plus précisément,  il y aurait lieu de faire l’inventaire des mécanismes de blocage absurdes peu en phase avec l’attitude majoritaire de tous les citoyens européens. En clair, plutôt que de vouloir renoncer à la ratification par voie référendaire, il serait plus judicieux de prévoir une consultation grandeur nature, c’est-à-dire à l’échelle européenne. L’occasion pourrait ainsi être donnée à tous les citoyens européens de se prononcer sur un sujet d’intérêt commun, le même jour, et ce dans le respect d’un quorum suffisamment représentatif de l’électorat dans les vingt-huit Etats membres de l’UE.

 

Le résultat des courses: moins de chantage, moins de manipulation, l’occasion de débattre des grands enjeux à l’échelle européenne, un gain pour la démocratie.

 

Photo (c) WSJ.com

 

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About Charles Goerens

Member of the European Parliament (Renew Europe)

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